Guerre de Yom Kippour : à travers les yeux d’un soldat

06.10.20
L’équipe éditoriale de Tsahal

Il y a 47 ans, durant Yom Kippour, Israël a été attaqué par une coalition d’États arabes et s’est retrouvé propulsé dans une guerre. Pendant trois semaines, les soldats israéliens se sont battus sans relâche pour défendre leur pays contre l’invasion des forces ennemies. Le lieutenant-colonel (Rés.) Avi Gur était alors un jeune officier, combattant au sein de la 401ème Brigade du Corps blindé mécanisé, sur le front sud. Les photos suivantes ont été prises par le lieutenant-colonel (Rés.) Avi Gur pendant la guerre de Yom Kippour. Il explique ce qui s’est passé, dans ses propres mots :

Lorsque la guerre a débuté, j’étais sur la ligne de front. J’étais commandant adjoint d’une compagnie dans le canal de Suez et notre but était de retenir les forces égyptiennes et de les empêcher d’attaquer Israël. Quelques heures plus tard, mon commandant a été tué et je suis devenu le commandant de la compagnie.

 

Voici une photo du commandant de mon bataillon, le lieutenant-colonel Emanuel Sakal, datant de la première semaine de la guerre. L’image reflète la doctrine de Tsahal, selon laquelle le commandant est sur le terrain aux côtés des forces, ce qui motive les troupes. Une fois que j’ai frappé le char d’un ennemi, il l’a vu en temps réel et m’a complimenté à la radio.

Pendant la guerre, il m’a demandé d’induire les forces égyptiennes en erreur en leur faisant croire que nous allions attaquer par le sud alors que nous allions attaquer par le nord. C’était très difficile pour moi parce que réussir signifiait qu’ils devaient me tirer dessus. Alors ce que j’ai fait, c’est conduire en zigzag dans le sable, formant un énorme nuage de poussière. Comment avons-nous survécu? Je ne sais pas. Certains appellent cela la protection divine et d’autres la chance. Après qu’ils aient commencé à nous tirer dessus, il a dit “nous avons atteint notre objectif”, et nous sommes rentrés tranquillement et prudemment.

La guerre de Yom Kippour a éclaté le 6 octobre 1973. Pensant que Tsahal ne serait pas prêt à défendre Israël le jour le plus saint du calendrier juif, une coalition de forces ennemies dirigée par l’Égypte et la Syrie a coordonné des attaques surprises, envahissant le plateau du Golan au nord d’Israël et le canal de Suez au sud. Les forces israéliennes étaient nettement moins nombreuses, avaient beaucoup moins d’équipement que les pays attaquants, et peu de temps pour développer rapidement une stratégie de combat.

Cette image montre la puissance d’un char qui a pu atteindre une cible à plus d’un kilomètre de distance. Sur la photo, vous pouvez voir mon canon, et la fumée noire au loin est la cible que nous avons touchée.

Imaginez une trentaine de chars qui sécurisent une zone de 143 km. Nous étions seuls face à des milliers de soldats et d’armes. Pour chaque trentaine de soldats ennemis, il y avait un soldat israélien. Ce n’est tout simplement pas proportionnel. Mais nous, les soldats israéliens, même si nous étions devant des milliers, nous ne nous sommes pas enfuis. Nous avons combattu de façon professionnelle et avec sagesse. Les gens n’avaient pas d’autre choix que d’être des héros.

Voilà le drame. Même la nuit, il fallait être en alerte. L’artillerie égyptienne était 30 fois plus forte que la nôtre.

Lorsque nous avons couru vers les chars, j’avais une caméra autour de mon cou. C’était assez inhabituel, parce que peu de gens avaient des caméras à l’époque. Nous avons commencé à bouger et il y avait des avions égyptiens qui nous attaquaient d’en haut. Des chars nous tiraient dessus, et des commandos égyptiens ont traversé le canal et tiré des missiles antichars. C’était comme le Far West – celui qui tire le premier reste en vie.

Le commandant de la compagnie de l’unité qui opérait plus au sud que la nôtre communiquant avec le commandant de notre bataillon.

Le deuxième jour de la guerre, des dizaines de milliers de troupes égyptiennes ont traversé le canal avec des centaines de chars, et les unités blindées ont subi de grandes pertes. En y repensant, Avi se souvient avec tristesse des soldats tombés :

Vous voyez vos amis se faire tuer... Vous voyez des gens, des amis, des blessés… Mais nous avons continué à nous battre.

 

Le canon du char. La fumée noire à l’arrière-plan sont des cibles sur lesquelles nous avons tiré. 

La mitrailleuse Browning 0.3 peut tirer en continu pendant plus de 10 secondes, et nous l’avons donc utilisée pour tirer sur les commandos égyptiens...

Après des jours de combat, Tsahal a lancé une série de contre-attaques contre les forces égyptiennes. L’offensive a été baptisée “Operation Abirey-lev” ou, “Opération Coeurs vaillants”.

À un moment donné, nous avons reçu l’ordre de traverser le canal. C’était la première fois que j’attrapais mes plaques d’identité militaire parce que je n’étais pas sûr de rester en vie. Pourquoi? Parce que mon char a dû traverser un pont instable. De plus, lorsque vous êtes sur le pont, vous êtes coincés. Vous ne pouvez pas aller ni à gauche ni à droite, et vous devenez une cible facile.

Une base de missiles égyptiens que nous avons conquise après qu’elle ait été abandonnée par des soldats égyptiens.

Il y avait des moments où j’étais agité, mais j’ai pu projeter un certain calme sur mes soldats. J’avais l’habitude de chanter pour eux dans notre réseau de communications internes. Quand nous nous sommes retrouvés récemment, ils m’ont dit qu’écouter ma voix les rassurait.

Je me souviens de cette photo. Elle a été prise avec mon appareil photo, mais c’est le tireur du char qui l’a prise. C’est une photo de moi parlant au commandant de la section qui opérait plus au nord que nous. Nous étions en Égypte et nous n’étions que quelques chars responsables d’une grande région.

Vers la fin de la guerre, les forces israéliennes ont encerclé la troisième armée égyptienne :

La 401ème Brigade du Corps blindé mécanisé a participé à l’une des plus grandes réalisations militaires de la guerre: encercler la troisième armée égyptienne. Ce n’était pas facile à faire, mais c’était incroyable… Le mot clé à mon avis est victoire, et nous avons été victorieux grâce à l’exécution de nos missions et grâce à l’héroïsme des soldats.